sábado, 21 de mayo de 2011

ROBERT SABATIER (Paris, 1923-2012) 
Chant triomphal de l'arbre

Arbre couleur d'oiseau, je n'ai plus peur des plaines
Je pourrai m'envoler par-delà le ciel noir
Mon printemps, ton printemps dansent à perdre haleine
L'enfant, le liseron grimperont jusqu'au soir
Grimperont jusqu'à Dieu plus haut que la montagne
Arbre couleur d'oiseau je resterai quand même
Porteur de chevelure, arbre parmi les arbres.
 
Arbre couleur de l'eau, je coule d'un poème
Dans tous les corps d'ici, dans les cœurs et les ailes.
Hommes, je vous habite un instant, puis je pars
Je reviens à mon cri. La fleur souffle une abeille
Pour lui donner le vol, le vrai suc du voyage
Mes chants et mes parfums jaillissent de mes branches
Et pour toucher le ciel, j'agite mon feuillage
Comme un grand pavillon habité de mésanges.
 
Plus vif au jour, plus pur qu'une source dans l'île
Ce peu de chair est là pour me garder du ciel
Autour de moi, la mer ; une aube en ma poitrine
Mon corps est la couronne étrange du soleil
Je cerne une douceur, un grand lac s'émerveille
D'éveiller tant de brume et de nimber mes cimes
Je demeure un atoll en ce monde immobile.
 
Arbre couleur d'oiseau, de cet oiseau qui brûle
Et renaît chaque fois que le grand feu s'éteint
Arbre, j'attends que vibre aussi la libellule
Je n'ai que mille bras pour serrer mes essaims
Et leurs grappes sont là pour me donner la vie
Pour me nourrir aussi d'un nouveau cœur vivant
Je ne puis les serrer que si tout le ciel prie
Je ne puis les vêtir, mon corps se dénudant.
 
Arbre couleur d'oiseau, j'ai des jambes sous terre
Je rampe vers l'enfer et vole au paradis
Au milieu de mon corps l'horizon se soulève
Les astres tournoyants sombrent quand je le dis
Arbre couleur d'oiseau, pourtant, j'attends des larmes
Quand le printemps s'achève, avec des gestes graves
Tourné vers le soleil, je pleure comme un fruit.  
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