martes, 1 de octubre de 2024

NÂZIM HIKMET (Turquía, 1901-1963)
Sofía 

Je suis entré à Sofia par un jour de printemps, mon amour.

La ville où tu naquis fleure le parfum du tilleul.

Je parcours un monde sans toi

Telle est ma destinée

Je n’y puis rien changer.

A Sofia l’arbre vient avant la pierre, l’arbre est plus beau que la pierre

A Sofia l’arbre et l’homme sont mêlés l’un à l’autre

Le peuplier surtout

Toujours sur le point de pénétrer dans votre chambre

de s’asseoir sur le tapis rouge...

Est-ce une grande ville que Sofia, me demandes-tu ?

Les villes, mon amour, sont grandes non par leurs rues

Mais par les poètes dont elles ont dressé la statue

                               Sofia est une grande ville...

Ici quand vient le soir tout le monde se répand dans les rues

Femmes, enfants, vieillards et jeunes gens

Des rires, des bruits, un bourdonnement,

                                une rumeur de long en large

Côte à côte, bras dessus, bras dessous, la main dans la main...

A Istanbul, à Chehsadebachi, les soirs de ramadan

- Tu n’as point connu ce temps-là, Munevver –

On se promenait ainsi, jadis.

Mais ces jours-là sont révolus

Si j’étais à Istanbul maintenant

                               y songerait-je seulement ?

Mais loin d’Istanbul

                               Tout est pour moi prétexte à nostalgie,

Même le parloir de la prison d’Uskudar.

Je suis entré à Sofia par un jour de printemps, mon amour

La ville où tu naquis fleure le parfum de tilleul

Je ne saurais te décrire l’accueil de tes concitoyens,

La ville où tu naquis est pour moi la maison d’un frère.

Mais la maison d’un frère ne saurait vous faire

                                                oublier votre propre maison

C’est un dur métier que l’exil, bien dur.

 

Varna, 24 Mai 1957

Traduit du turc par Hasan Gureh In, «Nâzim Hikmet, anthologie poétique» Scandéditions, 1993

 

Sofía

Entré en Sofía un día de primavera, mi amor.

La ciudad donde naciste huele a tilo.

Recorro un mundo sin ti

Este es mi destino

No puedo cambiar nada.

En Sofía el árbol viene antes que la piedra, el árbol es más hermoso que la piedra

En Sofia el árbol y el hombre se mezclan

El álamo especialmente

Siempre a punto de entrar en tu habitación

sentarse en la alfombra roja ...

¿Es Sofía una gran ciudad, me preguntas?

Las ciudades, mi amor, son grandes no por sus calles

Son por los poetas cuya estatua erigieron

                               Sofía es una gran ciudad ...

Aquí cuando llega la noche todos se derraman en las calles

Mujeres, niños, ancianos y jóvenes

Risas, ruidos, un zumbido

                                un rumor de ida y vuelta

Uno al lado del otro, del brazo, de la mano ...

En Estambul, en Chehsadebachi, en las noches de Ramadán

- No has conocido esa época, Munevver -

Solíamos caminar así.

Pero esos días terminaron

Si estuviera en Estambul ahora

                               ¿siquiera lo pensaría?

Pero lejos de Estambul

                               Todo para mí es un pretexto para la nostalgia,

Incluso la sala de visitas de la prisión de Uskudar.

Entré a Sofía un día de primavera, mi amor

La ciudad donde naciste huele a tila

No podría describirte la recepción de tus conciudadanos,

La ciudad donde naciste es para mí la casa de un hermano.

Pero la casa de un hermano no te haría

                                                olvidar tu propia casa

El exilio es un trabajo duro, muy duro.

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